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Le nom de Goethe évoque une ombre majestueuse, mais un peu
désuète, du genre de ces personnages impressionnants devant
lesquels on s'incline sans jamais oser solliciter leur intervention.
Le poète s'est forgé, en effet, cette statue de « pontife
des lettres » en une oeuvre de cent cinquante volumes ; il trône en bronze dans nombre de capitales
d'Europe septentrionale ; il cautionne des écrits en tous genres
: sciences, lettres, journaux. Banalisation d'un personnage dont la réputation finit par
occulter la réalité. Or, la vie de Goethe, inquiète,
tourmentée, correspond à deux questions qui le taraudent
jusque ce qu'il leur ait apporté une réponse - le Faust -
et qui déterminent l'ensemble de son action, multiple, dans le monde.
Si la première question - que suis-je ? - le conduit assez vite
à la conviction qu'il est poète, la seconde - « qu'est-ce qu'être
poète ? » - comblera toute son existence, parce qu'il entend
la poésie comme la confrontation avec le monde dont il s'agit de
percer le mystère. D'où ses multiples études
et son effort pour être à la fois ministre, savant, botaniste,
minéralogiste, acousticien, anatomiste, peintre, directeur de théâtre
et de revues, amateur de lettres étrangères, de femmes et
de bon vin. Si bien que l'illustre habitant de Weimar, drapé dans
son manteau de prophète et phare de l'Europe intellectuelle et politique
de son temps, s'amusera à se définir comme un combattant certes,
mais aussi comme «l'homme le plus gui et le moins accompli d'Europe
». Marie-Anne Lescourret est professeur d'esthétique
à l'université Marc Bloch de Strasbourg. Elle est l'auteur
de Rubens (Lattès, 1990) et de Emmanuel Levinas (Flammarion, 1994,
« champs », 1996).
Editions Flammarion, 1998
Prix indicatif : 25,92€
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