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Portail sud

 

texte de Jean VILLETTE

Les Portails de la cathédrale de Chartres

© Editions Jean Michel GARNIER 1994

       

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L'ensemble du portail et du porche sud a pour thème principal le temps de la Nouvelle Alliance, c'est-à-dire celui de la grâce - des "ans de grâce" - depuis l'enseignement du Christ et la fondation de l'Eglise, jusqu'à la fin du monde. D'où l'évocation du Jugement dernier, qui occupe, comme une conclusion, le grand tympan central. Mais il ne faut pas perdre de vue qu'on y trouve aussi des allu­sions à l'Ancienne Alliance, ce qui dénote un esprit de synthèse débordant le simple point de vue chronologique.

Très souvent, le Jugement dernier est sculpté symboliquement à la façade occidentale, tournée vers le couchant, parce que la journée qui s'achève suggère la fin des temps. C'est aussi la fin des temps qui avait été le thème essentiel pour les sculpteurs du Portail Royal, avec le retour triomphal du Christ dans la vision de l'Apocalypse. Il ne pouvait être question de reprendre le même sujet. Le Portail Royal regarde le couchant d'hiver, le sud-ouest. On choisit de représenter le Jugement dernier au portail méridional, qui est tourné en réalité vers le sud-est. C'est une exception.

A Notre-Dame de Paris, le Jugement dernier est exposé à la lumière du cou­chant; de même à Laon, Amiens, Bourges, Poitiers et en d'autres endroits comme Longpont (Essonne), Larchant, Rampillon et Saint-Sulpice-de_Favières. Mais il existe cependant des exceptions: à la cathédrale de Reims, le Jugement figure au nord, ainsi qu'à la cathédrale de Bordeaux; mais à Saint-Seurin de Bordeaux, il est au sud, de même à Beaulieu-sur-Dordogne où le thème est plutôt le retour triomphal du Christ à la fin du monde. A la cathédrale de Rouen, où il n'a jamais été exécuté, il était prévu au nord. Durant l'époque romane, c'était déjà du côté du couchant qu'on représentait l'Apocalypse, comme à Saint-Trophime d'Arles, ou le Jugement dernier, comme à Conques, et un peu plus tard à Saint-Denis, pour ne citer que ces exemples.

Les fondations du triple portail méridional de Chartres ont été mises en place en même temps que celles du nord, probablement avant la fin du XIIème siècle, vers 1198. C'est peu de temps après sans doute qu'on entreprit les supports extérieurs du porche sud: ils sont très différents, plus légers; ce sont des piliers carrés; les deux du centre s'accompagnent chacun d'une paire de fines colonnes. Les lin­teaux transversaux du porche central, au lieu d'être perpendiculaires au mur de façade, sont légèrement biais, de façon à donner une plus grande ouverture à l'arc extérieur, et donc obtenir un effet d'ampleur très sensible.

On estime que le porche méridional fut achevé avant celui du nord. Il est en tout cas certain que les deux ensembles de porches aux extrémités du transept étaient achevés avant 1224. En effet, par une charte datée du 26 mai de cette année-là, les chanoines décident que les merciers ne seront plus autorisés à étaler leurs mar­chandises "in capitellis", c'est-à-dire "à l'intérieur des porches", comme ils avaient l'habitude de le faire jusque-là, et qu'ils auront toute liberté désormais de s'installer à l'extérieur de la cathédrale, au flanc méridional de la nef 1.

La technique de construction des trois portails de la façade sud est exactement la même qu'au nord, tant pour la mise en place des colonnes torses, des colonnes à fût lisse et des grandes statues que pour la disposition des deux escaliers à vis, dont lès murs ont été montés en même temps que les ébrasements de deux por­tails contigus.

Pour ce qui concerne l'iconographie, les trois portails honorent la mémoire des saints selon la division classique: apôtres, martyrs et confesseurs. Chaque groupe fait l'objet d'un portail: il s'agit d'un livre divisé en trois chapitres. La divi­sion est moins rigoureuse qu'il n'y paraît puisque les apôtres sont aussi martyrs, même saint Jean, mort de sa belle mort mais qui avait subi, dit la tradition, le sup­plice de la cuve d'huile bouillante, à Rome, près de la Porte Latine. Quant aux termes de martyrs et de confesseurs, comme l'or) sait, ce sont des mots qui ont exactement le même sens, depuis leur origine, et signifient "témoins". Ceux qui ont payé de leur vie le témoignage de leur foi ont été honorés les premiers, à l'époque de la civilisation grecque. On les a appelés "martyrs", mot qui dérive directement du grec. C'est plus tard, dans le monde latin, qu'ont été honorés aussi ceux qui ont témoigné de leur foi par leurs écrits ou simplement leur manière de vivre et qui ne sont pas morts de façon violente.

1 - Voir le texte complet de la délibération de 1224 dans l'article sur la tête du gisant de Pierre de Celle, par Jean Villette, publié parle Bulletin Monumental (Tome 143 - III, 1985 - p. 236).

        

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